vendredi 29 avril 2011

Droit à la différence

Voici la traduction de deux articles publiés dans Salta21.


ÉDUCATION, DÉMOCRATIE ET VALEURS

   La province de Salta se distingue des autres provinces d’Argentine par la richesse de ses paysages, la force de ses traditions mais aussi pour être la seule province du pays qui oblige les élèves des écoles primaires publiques à suivre l’enseignement religieux. Et cela durant les heures de classe.

La Loi d’Education de la Province N°7546-08 affirme dans l’Article 8 que "les parents ou les tuteurs ont le droit que leurs enfants ou leurs pupilles reçoivent à l’école publique l’enseignement religieux en accord avec leurs convictions". Par "convictions", il faut comprendre religion catholique. Les cas de discrimination sont nombreux et les plaintes de parents quant à la partialité de cette loi augmentent de jour en jour.

Un cas similaire à beaucoup d’autres a eu lieu à l’école Joaquín Castellanos de Villa Las Rosas. Après avoir pris connaissance de la note qui demandait si les parents désiraient oui ou non que leurs enfants assistent à la classe de religion, la mère d’un élève est allée demander à l’enseignante de cette matière quelle était l'option dans le cas où son fils n’assiste pas à la classe susmentionnée. Surprise, l’enseignante n’a pas su lui donner une réponse car, selon ses propos, "(elle) ne s’était jamais imaginée ce problème puisque (elle) n’enseigne pas le christianisme mais les valeurs de la Bible".

Afin de trouver une solution, cette femme est allée parler avec la vice-directrice de l’école pour lui présenter la situation. Aussi surprise que l’enseignante de religion, elle lui a répondu que durant cette heure on enseignait des valeurs et que des enfants "d’une confession différente de la nôtre" assistaient à cette classe. Bien évidemment, on ne peut pas vivre sans religion ou sans prier un quelconque dieu. Elle a relevé également l’importance de participer à cette classe pour que les enfants puissent choisir eux-mêmes le culte qu’ils allaient professer. Et comme cette matière se charge uniquement d’enseigner le culte catholique, le choix devrait être plus facile.

A la fin de cette rencontre, la solution proposée à cette mère de la part de l’institution scolaire fut la suivante : que quelqu’un vienne surveiller son fils dans la cour pendant l’heure de religion. Comme elle n’avait pas le choix, elle est allée à l’école pour accompagner son fils dans la cour pendant que ses petits camarades répétaient comme des automates "Créateur, Créateur...". Au-delà d’être une solution honteuse, elle stigmatise et discrimine les gens différents. Elle génère un classement entre ceux qui croient et les autres.

La prof de religion, vexée par la décision de cette mère, lui dit que son fils n’allait pas être noté et que la seule manière d’obtenir une note était qu’il assiste à la classe. Face à la conception démocratique de l’enseignante, cette femme a décidé de poursuivre sa lutte et de rendre publique le cas de discrimination que son fils et elle subissaient.

Si elle a choisi une école publique c’est parce qu’elle a des convictions et qu’elle croit en l’éducation gratuite, publique, laïque et pour tous. Mais dans la province de Salta et à l’école Joaquín Castellanos, cela fait longtemps qu’on a oublié la loi 1420 et les fondements de l’éducation en Argentine. On ne peut pas nier que la Loi d’Education de la Province inclut la religion dans les programmes de l’école primaire. Mais on ne peut pas nier non plus, qu’en imposant l’enseignement d’une seule et unique religion et en pratiquant le chantage pour que enfants assistent à cette classe, l’école en question et indirectement le Ministère d’Education de la Province violent un principe de base de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (Art.18 : "Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion") ainsi que la Constitution Nationale et de nombreux traités internationaux qu’elle reconnait.

Mais tout cela importe peu pour cette école. Elle est à Salta, elle respecte et elle applique ce que dit la Province. Et on ne peut pas punir une école pour respecter autant la Loi d’Education jusqu’à la transformer en un nouveau livre sacré. Un livre sacré qui, entre l’autel du Ministère et les portes de l’école, a du s'alléger de la partie sur l’éducation sexuelle et les langues vivantes...


ÉDUCATION, DÉMOCRATIE ET VALEURS (ÉPILOGUE)

   L’article précédent, publié par Salta21 le vendredi 15 avril, a fait du bruit et est arrivé jusqu’aux hauts fonctionnaires du Ministère d’Education de la Province qui ont décidé d’organiser une réunion avec la maman en conflit avec l’école Joaquín Castellanos pour l’enseignement religieux.

La réunion a eu lieu le mardi 19 avril dans le bureau de la Directrice de l’école, en présence de la maman, de l’enseignante de religion, de la Directrice et de deux superviseuses de religion du Ministère d’Education, arrivées quelques minutes après le début de la rencontre.

A cause d’un manque de communication et un malentendu entre le personnel administratif de l’école, la Directrice n'a été informée de cette affaire seulement un jour avant la réunion avec la maman mais s’est montrée tout aussi disposée à arranger les choses avec bonne volonté.

En plus du texte original publié par Salta21, les superviseuses sont arrivées avec un article du journal El Intransigente. Dans ce dernier, non signé, on pouvait lire que FM Noticias (au courant des faits depuis le début) avait réalisé une interview de la Directrice de l’école. Faits totalement inventés et faux qui avaient pour but de salir le combat de cette mère pour ses convictions.

Durant l’heure et demie de réunion, chaque personne présente a présenté sa vision en essayant toujours de trouver une solution convenable en se focalisant sur le bienêtre du petit. La tension des premières minutes s’est évanouie pour laisser place à une discussion constructive et cordiale durant laquelle les opinions de toutes les parties ont été respectées et écoutées.

La solution offerte par les superviseuses, et qui consistait à ce que le petit reste avec la maîtresse durant l’heure de religion pour améliorer ses points faibles, a été acceptée par la maman ainsi que la Directrice et l’enseignante de religion.

Le bout du tunnel commençait à être en vue pour cette mère et son fils. Ils ont obtenu ce que l’on peut considérer comme une "victoire" sur des années de respect aveugle à la tradition toute-puissante de l’Eglise à Salta. C’est un pas important pour l’évolution de la société et des mentalités mais ils restent beaucoup de batailles à livrer pour que soit respectée la liberté de conscience de tous les habitants de Salta.

(Suivent les remerciements de l’auteur et de la maman pour les personnes qui ont permis de résoudre ce cas ainsi que les félicitations de la Directrice du journal pour la qualité du travail du compagnon journaliste.)

2 commentaires:

  1. Le Rouge a tout connu. Il sauvé le monde autant de fois que Burce Willis et Steeven Seagal réunis. "Il a grandement contribué à libérer l'Argentine du joug chrétien" liront nos enfants dans les livres d'histoire...
    "Et si un jour t'es trop musclé et que ça devient illégal et si un jour ils te mettent en tôle moi je viendrais te chercher" (les Fatals Picards - Bernard Lavilliers)

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  2. En attendant, je peux te dire qu'on s'est fait plein de copains à l'école et dans le quartier...Même la boulangère ne nous dit plus bonjour...Ah...tu aimeras ton prochain , mon cul !

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